La si longue marche de l'homme :
Depuis quelques mois une révolution s’opère, un vrai renversement des valeurs et des connaissances. Mais cela se fait d’une manière si silencieuse que cela ne provoque aucun remou. Pourtant, c’est un choc immense pour la communauté scientifique. Imaginez donc : la revue Science, la bible absolue en la matière, a annoncé en été 2009 que l’homme ne descend pas du singe mais que c’est plutôt le singe qui descend de l’homme. Exactement l’inverse de ce qui se clamait depuis l’avènement de la théorie de l’évolution !
Cela s’est-il fait subitement ? Certes, non. Cela faisait des années que des voix professaient ceci dans le mépris, ou au mieux dans l’indifférence. Mais comment ces voix avaient-elles su avant les autres la vérité actuelle, celle-là même qui était encore une ineptie hier ? A cause de nos pieds et de nos mains. Je vais vous expliquer.
En fait, c’est très simple. Au cours des années 1890, un paléontologiste belge, Louis Dollo, a établi un principe qui n’a jamais été depuis remis en question, celui de l’irréversibilité de l’évolution. En clair, un membre ou un organe qui évolue ne reviendra jamais à son état d’origine. Quelle conséquence a cette Loi de Dollo ? Prenons un exemple : si un membre se spécialise dans la vie parmi les montagnes, il ne pourra pas revenir à son état d’origine non-spécialisé qui lui permettait d’évoluer aisément en plaine. Il permettra toujours l’évolution en plaine, mais d’une manière plus difficile qu’avant car il restera spécialisé pour la montagne. Soyons encore plus concret : le cheval, qui ne possède plus qu’un seul doigt à chaque patte muni d’un gros ongle, le sabot, ne retrouvera plus jamais les doigts qu’il a perdu au cours de l’évolution.
Quel rapport avec l’homme, et notamment avec ses mains et ses pieds ? Le voici : la main de l’homme est totalement non-spécialisée alors que ses pieds sont au contraire extrêmement spécialisés dans la marche bipède. Soyons encore plus précis. La main de l’homme, ses os, ses tendons et ses muscles en témoignent, n’a pratiquement pas évoluée depuis 500 millions d’années, c'est-à-dire depuis l’ère primaire. Ce que traduit Yvette Deloison, chargée de recherche au CNRS, d’une formule lapidaire : « La main de l’homme n’a jamais été une patte ! ». Cette phrase est on ne peut plus signifiante : jamais la main de l’homme, si on remonte dans le cours du temps, n’a servi à autre chose qu’a être une main. Et ceci depuis 500 millions d’années. Et a fortiori, elle n’a jamais servi de patte à un animal quadrupède. C’est un point fondamental. Il faut bien le peser. Il signifie tout simplement que l’homme dérive d’une lignée d’animaux qui ont tous en commun une caratéristique bien cernée : la bipédie. Autrement dit, l’homme et ses ancêtres ont toujours marché sans discontinuité depuis 500 millions d’années.
Mais, hé ! Attendez ! Et la théorie qui dit que l’homme s’est redressé pour n’acquérir qu’assez récemment l’usage de ses deux mains, qu’en fait-on ? Elle a été démentie par son propre inventeur, Yves Coppens, et depuis un bon bout de temps déjà. Mais sa théorie était restée gravée dans nos têtes comme une loi d’airain alors même que son rejet est effectif depuis près de 10 ans déjà. Il faut dire qu’on ne savait pas trop par quoi la remplacer. En fait, si. Par la vérité qu’on clame maintenant. Mais il était si difficile d’admettre qu’on s’était trompé depuis des décennies, que l’homme ne dérive pas du singe, que c’est le contraire, et surtout que l’homme descend d’une lignée bipède depuis l’ère primaire. Car c’est bien cela la vraie révolution de l’article paru dans Science : la bipédie humaine a précédé l’homme lui-même. C’est inscrit dans ses pieds. Et dans ses muscles fessiers. Car une différence assez ignorée entre l’homme et le singe est l’homme a des fesses alors que le singe n’en a pas ou pratiquement pas. Bon, il a bien un fondement, un postérieur, mais rien qui ressemble à des fesses. Mais en quoi cette histoire de fesses importe-t-elle tant ? C’est qu’en fait les fesses, ou plutôt les muscles fessiers, sont les muscles les plus puissants chez l’homme. Ce sont ces muscles-là qui le maintiennent debout et qui lui servent à marcher et à courir. Or pour lier ces muscles au squelette, il faut des points d’attache, beaucoup de points d’attache, très étudiés, et très solides aussi. De fait, l’observation attentive de ces points d’attache prouve par a plus b qu’ils datent anatomiquement d’une époque si reculée qu’on ne l’estime même pas. L’homme est d’abord un bipède. Et il est fait pour la marche au sol. C’est l’autre grande différence entre l’homme et le singe : l’homme possède des coussinets graisseux, spécialisés pour la marche au sol, sous ses pieds alors que le singe n’en a pas. Ce dernier possède par contre des pieds préhensiles adaptés à la vie arboricole.
Mais, hé ! Attendez encore ! On sait que l’homme et le singe (et plus exactement le chimpanzé) n’ont que 1% de différence entre leurs gènes. Alors n’est-ce pas la preuve que l’homme et le singe, c’est quasiment la même chose ?
Non. Et les différences sont même nombreuses et frappantes. Un singe n’est pas un homme et inversement, c’est l’évidence même. Mais comment est-ce possible ? C’est que cette différence de 1% dans leurs gènes n’est qu’un leurre, l’arbre qui cache la forêt. En réalité, la seule chose qui compte est l’expression des gènes que chacun possède. C’est là que s’écartent irrémédiablement l’homme et le singe. Pourtant, oui, ils ont bien une chose en commun, un rapprochement indéniable : l’homme et le singe dérivent de la même lignée animale. Mais l’homme en a gardé la caractéristique principale, la bipédie, tandis que le singe s’est spécialisé dans la vie arboricole. On estime assez bien la date de la séparation de l’homme et du singe : entre 15 et 18 millions d’années. Autrement dit, et c’est encore un point important, le singe en tant que tel date de 15 à 18 millions d’années, et il en est donc de même pour l’homme, ce qui est bien plus que ce qu’on croit habituellement. Et avant ? Avant, il n’y avait qu’une seule lignée commune, celle qui remonte comme je l’ai dit plus haut à 500 milllions d’années.
Voici donc l’héritage le plus précieux et le plus visible de l’homme, sa base, son essentiel : cinq millions de siècles de bipédie. Et ce n’est pas fini. L’homme a déjà marché sur la Lune. Un jour il exportera sa bipédie sur Mars. Ce sera le véritable début de sa marche à travers l’univers.
Frédéric Gerchambeau, pour la réunion du 13/12/09.
Et pour aller plus loin : http://entretienavecyvettedeloison.blogspot.com/
Sculpture : Alberto Giacometti (1901-1966)
Cet article comporte des erreurs, des incohérences et déforme les propos de la scientifique. Il vaut mieux lire directement l'interview mentionnée à la fin de l'article.Quels sont les erreurs, les incohérences et les déformations en question dans mon article ???Bonjour Frédéric et merci beaucoup pour l'interview d'Yvette Deloison que tu as réalisée et mise en ligne. Sa théorie est très intéressante et convaincante (sauf sur un point).Pour répondre à ta question, voici quelques exemples d'erreurs d'interprétation :
"l’homme ne descend pas du singe mais que c’est plutôt le singe qui descend de l’homme"
Ici, tu confonds homme et bipédie et singe et quadrupédie.
"La main de l’homme, ses os, ses tendons et ses muscles en témoignent, n’a pratiquement pas évoluée depuis 500 millions d’années"
Là, il y a confusion entre ère primaire et 500 Ma, or, il y a 500 Ma, il n'y avait pas les animaux dont parle la scientifique.
"Autrement dit, l’homme et ses ancêtres ont toujours marché sans discontinuité depuis 500 millions d’années."
Le même problème que précédemment. A cette époque-là, les animaux vivaient dans l'eau.
"l’homme s’est redressé pour n’acquérir qu’assez récemment l’usage de ses deux mains"
Cette phrase n'est pas assez précise. Comme tu as écrit "assez récemment", il faudrait au moins que tu précises s'il s'agit d'Homo habilis, Homo erectus ou Homos sapiens.
"la bipédie humaine a précédé l’homme lui-même"
Il est inexact de dire "bipédie humaine", c'est bipédie tout court.
"l’homme et le singe (et plus exactement le chimpanzé) n’ont que 1% de différence entre leurs gènes"
Ce pourcentage n'est pas un argument pour différencier deux espèces. Sinon, je ne suis pas de la même espèce que mon voisin de palier. Idem pour l'expression des gènes.
Merci Rachel d'avoir donné tes arguments. Je vais pouvoir y répondre et me justifier.
1)"l’homme ne descend pas du singe mais que c’est plutôt le singe qui descend de l’homme"
Tu réponds : "Ici, tu confonds homme et bipédie et singe et quadrupédie."
Ma réponse : Non, je ne confonds rien. Je vais me d'ailleurs me contenter de citer Owen Lovejoy, l'homme à l'origine des découvertes dont je parle : « Les gens ont tendance à croire que nous descendons de quelque chose qui ressemble à un singe. En fait, c’est plutôt le contraire : les singes descendent de quelque chose qui ressemble plutôt à un humain, enfin, d’une lignée commune qui a donné l’humain." Précision : l'homme est resté en continuité directe avec la lignée qui a amené l'homme, c'est la lignée simiesque qui s'en est écartée. On date donc l'origine de l'homme à partir de cette séparation homme/singe. Mais comme je viens de l'écrire, il n'y a pas de discontinuité entre la lignée humaine et la précédente, celle d'avant l'écartèlement d'avec la lignée simiesque. On peut donc bien dire que le singe descend de l'homme.
2)"La main de l’homme, ses os, ses tendons et ses muscles en témoignent, n’a pratiquement pas évoluée depuis 500 millions d’années"
Tu réponds : "Là, il y a confusion entre ère primaire et 500 Ma, or, il y a 500 Ma, il n'y avait pas les animaux dont parle la scientifique."
Ma réponse : Il est bien évident que je ne parle pas stricto sensu de la main d'un homme qui n'exitait bien sûr pas il y a 500 millions d'années. Ce dont il est question ici s'appelerait plus techniquement "cinq extrémités radiales avec axe de symétrie au troisième doigt". C'est de cela dont je parle et dont parle Yvette Deloison, qui appelle cela une main, en rapport avec l'usage que nous faisons actuellement de cette structure, sans présumer de l'usage qui en était fait il y a 500 millions d'années. Mais ce qui est sûr, c'est que cette structure existait il y a déjà 500 millions et n'a pratiquement pas changé dans sa forme depuis cette époque fort reculée. Seules ont évolué la sensibilité des terminaisons nerveuses et l’indépendance des éléments.
3)"Autrement dit, l’homme et ses ancêtres ont toujours marché sans discontinuité depuis 500 millions d’années."
Tu réponds : "Le même problème que précédemment. A cette époque-là, les animaux vivaient dans l'eau."
Ma réponse : Ton argument est non seulement court mais surtout illogique. Certes l'ère primaire est aussi nommée "ère des poissons". Ce qui semble a priori te donner raison. Mais voilà, si on reprend l'argumentaire d'Yvette Deloison, depuis ses débuts la lignée humaine est bipède. Et comme dit dans ma réponse précédente, sa main, quelle qu'en fut l'usage au travers des époques, n'ayant jamais varié dans sa structure et surtout n'ayant jamais été une patte, il faut bien en tirer la conséquence logique : même si on ne connaît pas l'origine de la lignée humaine sur la terre ferme, il faut bien que l'ancêtre très lointain de cette époque soit passé de l'eau au sol en position verticale. C'est d'ailleurs la question que s'efforce d'éclaircir dans ses recherches François de Sarre (un spécialiste des poissons), cité dans l'interview. Quel type d'animal aquatique a réussi l'exploit de passer de l'eau au sol en position verticale ? Les résultats de ses recherches peuvent convaincre ou pas, mais la question posée est la bonne.
4)"l’homme s’est redressé pour n’acquérir qu’assez récemment l’usage de ses deux mains"
Tu réponds : "Cette phrase n'est pas assez précise. Comme tu as écrit "assez récemment", il faudrait au moins que tu précises s'il s'agit d'Homo habilis, Homo erectus ou Homos sapiens."
Ma réponse : A priori il s'agirait d'Homo erectus (homme dressé) mais peu importe car le "assez récemment" est à comprendre dans le contexte de mon article. C'est à dire que même si on place le "redressement" de l'homme (hypothèse maintenant contredite, d'où mon article) à 20 millions d'années, c'est "assez récent" (pour ne pas dire "très") par rapport au 500 millions d'années évoquées précédemment.
5)"la bipédie humaine a précédé l’homme lui-même"
Tu réponds : "Il est inexact de dire "bipédie humaine", c'est bipédie tout court."
Ma réponse : Là, c'est toi qui confonds. La bipédie en elle-même, c'est une chose. Et il y a des tas de types de bipédie, celle des chiens qui se mettent debout, celle des oiseaux, celle des kangourous, etc. Là, je parle bien de celle de l'homme. La bipédie humaine (en relation avec la lignée humaine remontant à plusieurs centaines de millions d'années) précède bien l'apparition de l'homme en tant que tel (c'est à dire après la séparation homme/singe).
6)"l’homme et le singe (et plus exactement le chimpanzé) n’ont que 1% de différence entre leurs gènes"
Tu réponds : "Ce pourcentage n'est pas un argument pour différencier deux espèces. Sinon, je ne suis pas de la même espèce que mon voisin de palier. Idem pour l'expression des gènes."
Ma réponse : Ne te trompe pas d'adversaire, ce n'est un argument personnel. En revanche, c'est un argument très répandu pour nier les différences, pourtant flagrantes, entre l'homme et le singe. Donc, en gros, l'homme est un singe en à peine plus évolué. Mais justement, la main du singe n'est pas celle de l'homme, ni son pied, etc. Cela dit, si, ce 1% de différence (ou quel que soit le chiffre exact) est très important. Mais pas dans le chiffre lui-même, dans sa signification. Il signifie justement qu'avec très peu de différences dans les gênes, on peut constater des différences très importantes. Le tout est d'en savoir plus à l'avenir sur l'expression des gênes. Ici on comprendra pourquoi 1% de différence dans les gênes font que l'homme est l'homme et le chimpanzé un chimpanzé.
On est d'accord sur deux points : c'est l'Homo erectus qui est censé s'est mis débout et 1% de différence de gènes signifie en fait beaucoup de différences. Pour le reste, je ne suis pas d'accord avec ce que tu dis, mais je ne vais pas continuer la discussion... J'ai plein d'autres choses à faire.Pour ma part sans être scientifique il me semble plutôt rassurant de précéder la bête et non l' inverse.D'ailleurs ce blog magnifique est bien la preuve actuelle que l' art n' est pas le fruit du talent des chimpanzés.Bonne continuation.Le singe dans sa verticalité s'est élevé à la cimes des arbres tandis que l'homme, dans sa verticalité ascensionnelle, mu par l'imagination dynamique et la pensée, a investi un univers cosmique sans limites.Cette différence égale 1%,quantitativement peu mais qualitativement infinie.
C'est l'unité de l'étre pensant dans son mouvement vertical.
L'INCONSCIENT orphelin dans la nuit sidérale glacée de l'étre, s'éveille à la conscience.
Que de théories nébuleuses sur nos origines.......... le différentiel entre le singe et l'homme prends sa source ailleurs: dans le processus d'intériorisation des percepts et affects, ainsi que dans les sensations que l'etre retire de son interactivité avec le milieu naturel
Processus d'adaptation, et de développement du cerveau, ou machine désirante en outils de production?
Il est intéressant d'observer que peu d"etres humains ont développés la pensée ou leur chant poétique intérieur.
Peut-étre 1%?
Peut-on classer les 99% qui restent dans le groupe végétatif ou animal?
Le singe restant tel un poéte des hauteurs, pantin dansant entre les arbres.